Les carrelets du littoral charentais
Si depuis la nuit des temps, l’homme “cueille” les fruits de la mer, il faut attendre le XVIIIe siècle pour voir apparaître une aquaculture sur le littoral charentais où l’on observe aussi les premiers pas de l’ostréiculture. Dès cette période, naissent des types de pêches encore en usage aujourd’hui, au filet et à la nasse.
Parmi les techniques de pêche au filet, l’une se distingue, semblant une première version des carrelets, vedettes de nos littoraux. Cette pêche se pratiquait à pied, avec un carrelet portatif sur un ponton en bois. En 1727, François le Masson du Parc, rapporteur du Roi, évoquait ainsi, dans un de ses rapports, le fait suivant au sujet des femmes pêcheuses de Saint-Palais-sur-Mer : « Elles pratiquent la pêche à la trullotte, entre les roches, du haut d’un plancher».
De nos jours, les carrelets sont suspendus au bout du mât des cabanes de pêche construites sur plateforme, posée sur pilotis et qui surplombent l’estran (zone de balancement des marées). Pour accéder à leur cabane, les pêcheurs et les pêcheuses traversent une petite passerelle qui relie la cabane à la terre ferme. Plus rarement, un escalier remplace la passerelle, accordant l’accès à la cabane uniquement par marée basse. Le filet de pêche est assez grand, carré, monté sur une structure métallique qui est elle-même suspendue par le gréement au mât, lequel est équipé d’une poulie et d’un treuil.
De nos jours, les carrelets et leurs cabanes bénéficient d’un réel enthousiasme de la part des acquéreurs et des visiteurs. Cet enthousiasme ne résulte pas d’une recherche de rentabilité car face aux dernières innovations en la matière, cette pêche est loin d’être la plus performante. Mais elle représente un patrimoine, une tradition et participe avec force et élégance au charme du littoral.
Il suffit d’une visite pour ressentir toute la ferveur maritime que recèlent ces petites cabanes pittoresques. Depuis la lucarne ou le ponton, tourné vers l’estuaire et l’océan, l’on s’imagine en un rien de temps pêcheur chevronné, un peu Robinson et un peu poète.
Pour y pratiquer la pêche, il faut de la patience, une marée dure six heures. Le filet se remonte au rythme et à la guise du pêcheur. Pendant que le filet fait son œuvre, les heures sont à la contemplation, à la lecture, aux arts ou aux apéritifs entre amis. Ces derniers s’accompagnent facilement de quelques crevettes fraîchement pêchées. Devenus des lieux de vie temporaires insolites, les cabanes suffisent aussi à celles et ceux qui ne souhaitent pas particulièrement s’improviser pêcheurs mais qui désirent vivre le bord de mer sous un angle original.